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Olive et Sardine
24 février 2011

LA FIN DES ANNEES NOIRES

 

Il y a 4 ans, les algériens rencontrés racontaient leur histoire les épaules basses et les yeux fatigués. Le doute ou plutôt la méfiance prenait le pas sur l’espoir naissant. Cette page est tournée aujourd’hui mais les souvenirs sont tenaces et les suites se font encore sentir. Trois discours se mêlent dans ce passage pour donner forme aux opinions et espérances de quelques algériens.

S             « La route pour arriver à la plage : on ne pouvait pas l’emprunter toutes ces années. Les barbus étaient là, dans les fourrés. »

J              « On ne passait pas à proximité des forêts. Dans mon enfance, j’allais souvent voir ma tante : elle habite aux cascades d’El Ourit. On se baignait dans la rivière, on se jetait dans les vasques. J’ai beaucoup de souvenirs d’enfance de ce lieu. Je n’y suis pas retourné en 10 ans. Il était impensable de s’y rendre après 4h30, je n’y allais pas de toute façon. »

S             « Les salafistes m’ont arrêté une fois. Je rendais visite à ma tante à Chlek, c’était au petit matin. Ils m’ont dit : « C’est toi le gars d’Oran. ». Je les avais jamais vus.  Ils m’ont pris mes papiers et mon portefeuille. Je ne suis pas retourné chez ma tante depuis. C’est trop dur. »

J              « Avant, on était un peuple d’aventuriers. On partait sac au dos pour plusieurs jours. Toutes ces choses nous semblent désormais inaccessibles. On a pris l’habitude. »

S             « Je ne me hasarde jamais dans une forêt que je ne connais pas en voiture, question de sécurité. On est trop repérables, je n’entendrais pas quelqu’un arriver. »

J              « Les barrages policiers datent de cette période. Ils viennent de lever l’état d’urgence, ils devraient disparaître mais les policiers sont trop habitués. Nous aussi d’ailleurs : c’est devenu naturel. A l’époque, les militaires et policiers étaient les notables de la ville : tout le monde les connaissait. On a eu 2 attentats à Tlemcen. Après, c’étaient les barrages, et même les chars. Tu te rends compte ce que ça fait de voir des chars dans sa ville ! »

S             « A Oran, on n’a jamais eu d’attentats. D’ailleurs, on n’a jamais eu le couvre-feu non plus. Il y a beaucoup de militaires : la marine. Les terroristes n’ont pas pu faire ce qu’ils voulaient. Je n’aime pas les barbus, tu sais, et les burqa, je peux pas les voir non plus. »

R             « Les terroristes ont fait du mal au pays. Tu sais, une fois, je suis allé en Tunisie. J’ai rencontré des belges au resto et on a commencé à parler en français. La femme m’a demandé ma nationalité et j’ai dit que j’étais algérien. Elle a alors enfoui son nez dans sa soupe et n’a plus soufflé mot. »

S             « On n’est pas des terroristes ! Est-ce que tu t’es senti une fois en insécurité ? Est-ce que quelqu’un t’a dit qu’il y a des terroristes ? Y en a Plus ! Tu peux aller où tu veux. Les algériens te recevront avec les meilleurs égards. »

R             « Dites à vos amis que l’Algérie n’est pas dangereuse. Dites-leur que nous serions heureux de les accueillir. »

S             « Une révolution comme dans les autres pays arabes est impossible. On sort à peine des années noires. Il y a eu trop de sang, trop de violences. Aujourd’hui, l’Algérie remonte la pente. On ne va pas tout gâcher. »

R             « Les manifestations se passent à Alger. Elles sont organisées par des kabyles. Ils s’en servent pour réclamer leur indépendance. »

J              « Les dernières élections libres ont débouché sur le terrorisme. Les gens voulaient le départ du FLN et ils ont voté pour le principal parti d’opposition : le Front Islamique du Salut.  Après, ça a été les ténèbres. »

R             « Les terroristes parlaient de Jihad mais ils ne lisaient même pas les sourates en entier. Ils recrutaient dans les quartiers populaires parmi les illettrés Le Qûran nous dit simplement qu’un musulman doit mener le jihad quand on tente de le convertir de force. Un point c’est tout ! »

S             « Le président est bien, c’est son entourage qui pose problème. Mais on connaît pas son entourage : il reste dans l’ombre. Qui devons-nous affronter ?  De toute façon, maintenant, on vit bien. On s’en sort au moins : c’est déjà beaucoup. »

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